Fortune et hauts revenus
La répartition des revenus et de la fortune
Pour une vaste majorité de ménages, les salaires constituent la principale source de revenus. Par contre, un peu plus d’un ménage sur dix perçoit un revenu d’une activité indépendante. D’autres sources de revenus sont les retraites ou les revenus du capital. Ces dernières années, un nombre croissant d’études étaient consacrées à la question de la répartition des revenus dans plusieurs États. La figure ci-dessous montre, pour différents pays, quelle est la part du revenu total perçue par le 1 % de salaires le plus élevé. Les estimations se basent tant sur les données de l’impôt sur le revenu que sur des sondages.
La Suisse s’inscrit dans la moyenne européenne en matière d’inégalité des revenus. Cependant, la part de revenu du 1 % de salaires le plus élevé de la population a également grandi en Suisse, d’environ 2 % entre les années 1990 et la crise financière. Depuis, la proportion de hauts revenus fluctue autour de 11 % de l’ensemble des revenus. Les responsables de cette évolution sont surtout les salaires, mais aussi les revenus du capital et d’une activité indépendante, qui ont augmenté plus fortement chez les hauts revenus que dans le reste de la population.
Le 1 % de salaires le plus élevé empoche aujourd’hui 10,6 % de tous les revenus. Dans les années 1970 et au début des années 1990, la proportion de hauts revenus était encore plus faible. Outre le niveau, la volatilité de la part prise par les hauts revenus s’est également accrue.
Sources : USA 1950-1961, Fisher-Post (2020) ; USA 1962-2016, Piketty, Saez & Zucman (2016) ; France 1950-2014, Garbinti, Goupille-Lebret & Piketty (2018) ; France 2014-2016 et les autres pays : Blanchet, Chancel & Gethin (2020).
De manière générale, la fortune est répartie de façon encore plus inéquitable que les revenus. Ceci est particulièrement prononcé en Suisse. En 2019, le 1 % de contribuables les plus aisés possédaient plus de 44 % de tous les actifs nets imposables en Suisse (cf. figure 12). Tout comme l’inégalité des revenus, l’inégalité de la fortune s’est faite plus criante ces dernières années. En 2003, 3 % de la population possédait la moitié de tous les biens. En 2019, ils n’étaient plus que 1,6 %. Ces 1,6 % de contribuables possèdent donc autant que les 98,4 % restants réunis.
Les avoirs des caisses de pensions ainsi que de la prévoyance facultative 3a sont exonérés d’impôts en Suisse. En conséquence, ils ne sont pas pris en compte dans cette statistique. Aucune statistique en Suisse ne permet à l’heure actuelle de détailler la répartition en incluant ces avoirs.
La fortune nette des 10 % de contribuables les plus riches de Suisse était, en 2019, plus de trois fois supérieure à celle des 90 % restants réunis.
Source : Statistique de la fortune des personnes physiques AFC, calculs de l’auteur, cf. annexe méthodologique.
Pour explication : La fortune nette correspond à l’ensemble des valeurs patrimoniales imposables, déduction faite des dettes. Les va-leurs patrimoniales imposables sont l’argent, les titres, les biens immobiliers et fonciers, mais aussi la possession d’autres objets de valeur (comme des voitures ou des objets d’art et des bijoux). Les rentes de la prévoyance profes-sionnelle (2e pilier) et de la prévoyance individuelle liée (3e pilier) ainsi que le mobilier de ménage ne sont pas impo-sables. Ils ne sont donc pas pris en compte dans les statistiques. Par ailleurs, les biens immobiliers sont comptabilisés selon une valeur vénale estimée, généralement inférieure à la valeur marchande effectivement réalisable, ce qui en-traîne une sous-estimation du patrimoine immobilier.
Évolution des revenus de 2000 à 2023 : les hauts salaires sont gagnants
Bien que les salaires réels aient augmenté, la grande majorité n’a pas beaucoup plus pour vivre en 2023 qu’en l’an 2000. Le revenu disponible (salaire après déduction des impôts, taxes et loyers) n’a que peu progressé en termes réels pour les catégories de salaire basses et moyennes. En revanche, les bénéficiaires de revenus élevés et très élevés voient aujourd’hui plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de francs de plus tomber chaque mois sur leur compte. Comme nous l’avons montré dans les chapitres précédents, les raisons de cette situation sont multiples : une croissance salariale plus élevée pour les hauts salaires, des allègements fiscaux pour les gros revenus, l’augmentation des primes d’assurance-maladie et la diminution des réductions de primes. À cela s’ajoute la nette augmentation des loyers au cours des années écoulées, ce qui pèse également de manière disproportionnée sur les bas revenus et les familles.
Lire d’autres thèmes
Rester au courant
Rester au courant
Contact
Union syndicale suisse (USS)
Monbijoustr. 61, 3007 Berne
tél. +41 (0)31 377 01 01